Une grande fortune à Issoudun au XIXe siècle

  • Château de la Visitation  
  • Pierre Heurtault du Mez jeune médecin, par Mauzaisse 
  • Laure Bezave de Mazières 
  • Carte d'électeur de Pierre Heurtault du Mez, 1846. 
R. Pecherat et V. Baud
Mise à jour :
2/1/2012 à 14 h 38
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Un notable patriote

Son père, Jacques-François (1734-1815), issu d’une ancienne famille anoblie par les charges municipales, premier maire élu d’Issoudun, avait acheté à la Révolution l’ancien monastère de la Visitation pour l’aménager en riche demeure bourgeoise. Et par patriotisme, au lieu de payer ce bien national en assignats dévalués, il avait réglé cash 52 000 livres en bonne monnaie ! Ses revenus, qui s’élèvent en 1809 à 30 000 francs, sont essentiellement d’origine foncière (fermages). Son fils va accroître considérablement ce chiffre.

La première fortune de l’Indre

Pierre Heurtault hérite donc de son père une belle fortune, mais aussi un esprit tourné vers le progrès. Après des études au collège Louis le Grand, puis à la faculté de médecine de Paris, il revient à Issoudun en 1815 et épouse en 1820 une riche héritière de Bourges, Laure Bezave de Mazières. De santé fragile, celle-ci lui donne une fille unique, Blanche, et meurt prématurément en 1831.

En août 1830, alors que les « maccabés » (vignerons) se révoltent contre les taxes qui frappent leur précieux liquide, Heurtault est simple garde national et écrit presque tous les jours à sa femme. Il raconte la destruction systématique des archives fiscales, sans effusion de sang et dans une atmosphère de fête : le peuple lui est sympathique et pour faire baisser sur le marché le prix du blé que la spéculation et les troubles ont fait monter, il met en vente 5 000 boisseaux de froment de ses greniers. A cette époque de suffrage censitaire où il faut payer une forte contribution pour être électeur, et une plus forte encore pour être éligible, il a entre 80 et 150 000 francs de revenu annuel, plus que n’en rapportent la terre de Valençay ou les vastes domaines des Bertrand.

Après la mort de sa femme, Pierre Heurtault se consacre à l’éducation de sa fille, à la gestion de ses propriétés, à l’aménagement de son parc et à sa carrière politique : il est conseiller général du canton d’Issoudun-nord et député de l’arrondissement d’Issoudun (1837-1846). Ses agendas nous renseignent sur ses dépenses au jour le jour, comme en 1844 le portrait de sa fille au daguerréotype, ancêtre de la photo, où en 1847 son premier voyage en chemin de fer jusqu’à Châteauroux. Il a la joie de marier sa fille en 1842. Un échec politique voile cette félicité : de tendance « gauche dynastique », il est battu par un ami de vingt ans, le maire d’Issoudun Thabaud-Linetière, devenu conservateur. Battu, il gère sa fortune, voyage. Éloigné des républicains radicaux comme des conservateurs autoritaires qui l’emportent avec Louis-Napoléon Bonaparte, il meurt en 1852.

Les successeurs

Sa fille, Marie, vicomtesse Duquesne, utilise son immense fortune pour les œuvres pieuses, comme celle du P. Chevalier, fondateur des Missionnaires du Sacré-Cœur. Elle aura une fille, Marie Duquesne, qui meurt dans l’incendie du Bazar de la Charité le 4 mai 1897. Elle avait épousé le vicomte Ferdinand de Bonneval, lui aussi ardent soutien des œuvres catholiques, député conservateur (1885-1889). 

Un beau fonds d’archives, donné aux Archives départementales en 1959, et de majestueux bâtiments, légués au diocèse de Bourges en 1960, témoignent encore de la fortune et de la générosité des Heurtault et de leurs successeurs.

Marc du POUGET
Directeur des Archives départementales et du Patrimoine historique de l'Indre

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