Polycarpe : de Smyrne à Saint-Marcel
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Les Lyonnais, très attachés à la tradition « johannique », vénèrent saint Polycarpe, à qui est consacrée une belle église sur les pentes de la Croix-Rousse. C’est donc la métropole chrétienne entre Rhône et Saône qui aurait dû logiquement accuellir le grand tableau que vous découvrirez dès votre entrée dans l’église de Saint-Marcel. Il faut les détours de la Providence ou les mécanismes des attributions d’œuvres d’art pour expliquer cette localisation surprenante.
Lyon y est pour quelque chose : l’auteur, Paul Chenavard (1807-1895), est un peintre lyonnais réputé, romantique en marge de l’Eglise catholique, qui s’est pris de passion pour le récit de la mort du martyr. En 1842, le ministre de l’intérieur, chargé de remeubler les églises dévastées à la Révolution, lui passe commande d’un tableau : ce sera « Le martyre de saint Polycarpe », remarqué au Salon de 1841. Tableau monumental de 6m sur 4 attribué d’abord à Sainte-Sévère, puis finalement à Saint-Sauveur d’Argenton. Par ses anatomies, par la vivacité des couleurs, l’œuvre choquait la piété des fidèles. Le curé y fit réaliser de « fortes retouches », puis l’envoya en 1866 au musée récemment créé de Châteauroux, où l’on fit enlever les repeints pudibonds. En 1877, Argenton récupérait le tableau, placé à Saint-Etienne en attendant un musée qui devait voir le jour. Il y est resté jusqu’en 2010, l’église ayant entretemps été désaffectée et transformée.
Il fallut toute la bonne volonté des communes concernées, aidées par leur député, par le Conseil général de l’Indre et par le ministère de la culture, qui a fourni le subventionnement maximum et apporté son suivi technique, il fallut aussi le savoir-faire du restaurateur pour que saint Polycarpe retrouve un abri convenable chez saint Marcel (un peu plus jeune que lui, puisque martyrisé sous Aurélien entre 270 et 275 !).
Avec le Martyre de saint Polycarpe, les chasses en émail limousin, les stalles gothiques dans une majestueuse architecture romane et gothique, l’église de Saint-Marcel offre ainsi au croyant comme à l’amateur d’art de nombreux sujets d’intérêt.
Marc du POUGET
Directeur des Archives départementales et du Patrimoine historique de l'Indre et Conservateur des antiquités et objets d’art